La boule au ventre, ou quand rouler à vélo reste un acte militant

Ce matin durant mes 40 minutes de trajet à vélo, j’ai eu la boule au ventre (un peu plus que d’habitude).

La boule au ventre bien sûr en pensant à Paul.

La boule au ventre en me faisant frôler par un camion à l’endroit précis où un ami d’enfance a eu moins de chance que moi et y a laissé sa vie.

La boule au ventre quand un automobiliste m’a grillé la priorité mais m’a assuré très sérieusement, ma roue à quelques millimètres de sa portière, que son clignotant lui donnait la priorité.

La boule au ventre en pensant à l’un de mes proches qui a fait un vol plané dans un talus à cause d’un automobiliste qui a manqué de l’écraser volontairement avant de s’arrêter pour l’agresser et lui cracher dessus.

La boule au ventre en pensant aux commentaires d’automobilistes crachant leur haine contre les nouveaux aménagements routiers favorisant les piétons et les cyclistes parce qu’ils réalisent qu’ils ne sont pas seuls au monde.

La boule au ventre en pensant à mon ami Julien qui a vu sa vie changer à jamais après des mois de convalescence parce qu’un automobiliste n’a pas voulu s’arrêter à un stop (attention récit et images difficiles).

La boule au ventre en repensant à cet automobiliste qui n’a pas apprécié que je l’invective après qu’il a manqué de m’écraser et qui m’a poursuivi avec agressivité au point que je doive me cacher dans un garage.

La boule au ventre en empruntant la route quand j’estime que les infrastructures cyclables me mettent en danger car elles ont manifestement été créées par des personnes qui ne sont  jamais monté·e·s sur un vélo.

La boule au ventre en me disant qu’il n’y a pas un trajet où je ne passe pas à deux doigts de ne plus revoir mes filles et mon épouse.

La boule au ventre en pensant au nombre de fois où j’aurais pu être Paul.
Où nous toutes et tous qui roulons à vélo pourrions être Paul.

Rouler à vélo est plus que jamais un acte militant, un acte politique. Mais cela doit cesser.

Il est temps que nos routes soient sûres pour l’entreprise cyclistes. Il est temps que notre boule au ventre s’en aille.