La boule au ventre, ou quand rouler à vélo reste un acte militant

Ce matin durant mes 40 minutes de trajet à vélo, j’ai eu la boule au ventre (un peu plus que d’habitude).

La boule au ventre bien sûr en pensant à Paul.

La boule au ventre en me faisant frôler par un camion à l’endroit précis où un ami d’enfance a eu moins de chance que moi et y a laissé sa vie.

La boule au ventre quand un automobiliste m’a grillé la priorité mais m’a assuré très sérieusement, ma roue à quelques millimètres de sa portière, que son clignotant lui donnait la priorité.

La boule au ventre en pensant à l’un de mes proches qui a fait un vol plané dans un talus à cause d’un automobiliste qui a manqué de l’écraser volontairement avant de s’arrêter pour l’agresser et lui cracher dessus.

La boule au ventre en pensant aux commentaires d’automobilistes crachant leur haine contre les nouveaux aménagements routiers favorisant les piétons et les cyclistes parce qu’ils réalisent qu’ils ne sont pas seuls au monde.

La boule au ventre en pensant à mon ami Julien qui a vu sa vie changer à jamais après des mois de convalescence parce qu’un automobiliste n’a pas voulu s’arrêter à un stop (attention récit et images difficiles).

La boule au ventre en repensant à cet automobiliste qui n’a pas apprécié que je l’invective après qu’il a manqué de m’écraser et qui m’a poursuivi avec agressivité au point que je doive me cacher dans un garage.

La boule au ventre en empruntant la route quand j’estime que les infrastructures cyclables me mettent en danger car elles ont manifestement été créées par des personnes qui ne sont  jamais monté·e·s sur un vélo.

La boule au ventre en me disant qu’il n’y a pas un trajet où je ne passe pas à deux doigts de ne plus revoir mes filles et mon épouse.

La boule au ventre en pensant au nombre de fois où j’aurais pu être Paul.
Où nous toutes et tous qui roulons à vélo pourrions être Paul.

Rouler à vélo est plus que jamais un acte militant, un acte politique. Mais cela doit cesser.

Il est temps que nos routes soient sûres pour l’entreprise cyclistes. Il est temps que notre boule au ventre s’en aille.

Transport de marchandises: l’avenir devrait être sur les rails !

Note: texte originellement publié dans le courrier des lecteurs du Journal de Morges dans son édition du 6 avril 2023

Alors que l’urgence climatique n’est plus à démontrer, il semblerait logique que toutes et tous – particuliers, entreprises, communes, cantons et confédération – tirent à la même corde et fassent le maximum pour protéger l’environnement en baissant leur impact.

Or, comme nous l’avons appris dans l’édition du 3 mars du Journal de Morges, le rail va être abandonné au profit de la route pour transporter les céréales entre les centres collecteurs de l’entreprise situés à Bussy-Chardonney (Hautemorges) et Penthalaz, car les installations ne sont plus aux normes et nécessitent des travaux « trop coûteux ».
Ce sont donc 120 trajets en camion qui achemineront ces 3’000 tonnes de céréales par an – en plus des 4’500 tonnes déjà transportées par ce biais – et qui viendront encombrer encore davantage les routes de la région, avec l’impact climatique et tous les désagréments pour les riverains que nous connaissons. Pourtant, les deux sites sont à proximité directe des rails et déjà équipés d’infrastructures de (dé)chargement !

A l’heure où il est demandé à la population de baisser son impact, notamment en optant pour une mobilité respectueuse du climat, il est urgent que des solutions soient trouvées et des incitations proposées aux entreprises pour éviter ce genre de décisions incompréhensibles qui vont à contre-courant des bonnes pratiques en matière de protection de l’environnement et de la santé des riverains.

Vélo: des infrastructures, pas des gymkhanas svp!

Lorsqu’on roule en vélo, on est régulièrement confronté à des infrastructures dont la cohérence peut être légitimement questionnée. Entre croisements dangereux, pertes de priorité, mélanges de modes de mobilité, incohérences de la signalétique, le stress est constant alors que l’on ne demande qu’une chose: se rendre d’un point A à un point B comme tout autre utilisateur de la route.

Par exemple, la médaille de l’infrastructure la plus ubuesque que j’emprunte régulièrement revient à la route cantonale entre l’EPFL et la Bourdonnette. Sur un tronçon d’environ 2 kilomètres, c’est une succession de pertes de priorité au profit du trafic motorisé, des passages dangereusement près des arrêts de bus desquels descendent des hordes d’étudiant·e·s, des mélanges avec les piétons, des angles avec peu de visibilité, des gendarmes couchés à faire fantasmer Simon Ammann, ou encore des sens cyclables qui s’inversent sans crier gare (oui oui!). Toutes ces situations mettent les cyclistes dans une insécurité et un stress constants, et mènent parfois à des situations conflictuelles qui pourraient facilement être évitées, notamment en autorisant les vélos sur la voie de bus, empruntée par seulement quelques bus par heure aux heures de pointes.

Autre exemple à Echandens, sur la route cantonale entre la Venoge et le giratoire de la Poste :

Entrée et sortie de la route cantonale au niveau d’Echandens
  • D’abord, les cyclistes doivent se déporter sur la gauche de la route pour se placer sur une présélection, juste après la sortie du giratoire (où ils sont déjà très vulnérables et souvent pressés par les automobilistes pour se rabattre à droite de la chaussée): premier danger.
  • Puis traverser la piste venant d’en-face, avec des véhicules arrivant vite au giratoire: deuxième danger, première perte de priorité
  • Après le cheminement de l’autre côté de la glissière (ça c’est bien), retour au milieu de la route: deuxième perte de priorité, troisième danger
  • Et enfin, reprendre la route comme les autres usagers: troisième perte de priorité, quatrième danger

Cela fait un peu beaucoup pour aller simplement d’un bout à l’autre de la route, non ?

Nous les cyclistes voulons simplement aller d’un point A à un point B rapidement et sereinement, sans devoir céder la priorité maintes fois aux autres usagers sous prétexte qu’ils sont plus gros ou plus rapides.

Si vous faites partie des automobilistes qui s’insurgent car les cyclistes n’utilisent pas toujours les infrastructures, demandez-vous pourquoi et dites-vous que si ces dernières étaient sécurisantes plutôt que dangereuses et agréables à utiliser plutôt que pénalisantes, nous le ferions systématiquement.

En menant une politique du « tout voiture » depuis l’invention de ces dernières, on a amené le vélo, un moyen de transport simple réglant beaucoup de nuisances dues au trafic motorisé, à un niveau de complexité incompréhensible.

Les coups de peinture ne sont pas une infrastructure, mais les gymkhanas n’en sont pas non plus.

Sondage PRO VELO: à un coup de pédale du 100%

Celles et ceux qui me connaissent savent l’importance qu’a pour moi le vélo, pas en tant que simple moyen de transport, mais en tant que mode de vie.

Avec mes près de 10’000 kilomètres par an, sur les routes été comme hiver, membre Provélo, on aurait pu s’attendre à ce que mon score au sondage PRO VELO destiné aux candidat·e·s au Grand Conseil soit de 100%… Et pourtant, j’ai reçu plusieurs retours de personnes ayant été étonnées que je ne fasse « que » 93% de réponses en faveur du vélo.

Voici donc, en toute transparence, les principales questions qui m’ont fait perdre des points et les explications de mes réponses:

Les passages à niveau doivent être sécurisés et remplacés par des alternatives appropriées (passerelles, passage inférieur, …) : Plutôt d’accord (au lieu de Tout à fait d’accord)
Si des infrastructures légères (type passerelle) permettent de by-passer les passages à niveaux, alors faisons-le. Mais je ne suis pas certain qu’il soit proportionné de créer des infrastructures aussi importantes que des passages sous-terrain pour des passages à niveau qui restent relativement peu nombreux dans notre région.
Les passages sous-terrain occupent de l’espace public, requièrent une grande quantité de béton et… sont très coûteux. Je privilégierais donc de garder ces montants pour réaliser d’autres infrastructures permettant de mieux sécuriser l’espace dédié aux vélos. Ce qui n’empêche toutefois pas de trouver des solutions pour rendre ces passages à niveau moins glissants !

L’accès des cycles dans les transports publics doit être : Payant
Je pars du principe que si je me déplace avec mon vélo dans le train, j’occupe plus d’espace et nécessite une infrastructure dédiée. Il est donc à mon sens normal que je contribue de manière plus importante au financement des infrastructures d’accrochage et à l’occupation de l’espace.
Je suis par contre pour une baisse des tarifs et surtout pour une procédure de réservation bien moins contraignante qu’actuellement, et évidemment pour une généralisation et une augmentation des espaces vélos dans les trains suisses.

De manière générale, les bus doivent prendre en charge les vélos : Plutôt d’accord
Dans un monde idéal, on devrait pouvoir monter et descendre de chaque véhicule avec notre vélo. Mais en tant que campagnard, j’utilise beaucoup le bus et il m’est arrivé régulièrement d’être fortement gêné au moment d’y monter avec une poussette car des vélos occupaient l’espace dédié à ces dernières. Les personnes à mobilité réduite sont également impactées.
Je ne pense pas que l’on pourra inventer de l’espace dans les bus et à moins de les accrocher derrière le véhicule comme sur les Car Postaux en montagne, ce qui n’est évidemment pas envisageable dans des lignes urbaines et péri-urbaines, je ne vois pas actuellement de solution pour le faire de manière harmonieuse avec les autres usagers.
Mais qui sait, peut-être une solution pourra-t-elle être trouvée à l’avenir pour développer la multimodalité ?

De manière générale, on remarquera aussi que sur les cinq candidat·e·s du district de Morges au Grand Conseil réalisant un meilleur score que moi, deux pratiquent très peu le vélo et un carrément jamais. C’est donc un signe positif d’ouverture envers les utilisatrices et utilisateurs d’autres types de mobilité et je les en remercie !

Et si on ne devait retenir qu’une seule chose de ce sondage, c’est que les Vert·e·s sont LE parti engagé pour le vélo !

Photo: souvenir d’un « vélotaf » de début de journée mémorable en octobre 2020 à Apples.